Lorsqu’un décès survient sans descendance, sans parent vivant ni conjoint survivant, la question de la transmission du patrimoine se pose de façon spécifique entre frères et sœurs. Le droit français prévoit dans ces situations des règles précises pour la succession. L’enjeu porte notamment sur l’application d’une exonération des droits de succession, qui peut permettre de transmettre des biens sans fiscalité entre frères et sœurs, à condition de remplir certains critères. Récemment, le cas d’un héritier lié par un Pacs a soulevé une question centrale : un tel engagement affecte-t-il le bénéfice de cette exonération ? L’étude de ce point aide à mieux anticiper les transmissions familiales et à comprendre l’impact du statut matrimonial sur la fiscalité successorale.
le régime d’exonération des droits de succession entre frères et sœurs
Le droit accorde une exonération des droits de succession lors de la transmission de biens entre frères et sœurs, sous trois conditions strictes. Chacune vise à limiter le champ d’application du dispositif.
- situation matrimoniale : le bénéficiaire doit être célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps au moment du décès. Cette condition exclut toute personne engagée dans une union reconnue.
- âge ou infirmité : il faut avoir plus de 50 ans lors de l’ouverture de la succession, ou être atteint d’une infirmité empêchant d’assurer par son travail les besoins essentiels.
- domiciliation commune : la résidence doit avoir été partagée avec le défunt pendant les cinq années précédant le décès, attestant ainsi d’une réelle communauté de vie.
Chacune de ces conditions doit être respectée pour ouvrir droit à l’exonération. Par exemple, un frère divorcé, âgé de 55 ans, ayant vécu avec le défunt durant les cinq dernières années, peut être exonéré. Un frère marié ou vivant en couple n’y a pas droit.
l’abattement en cas d’absence d’exonération
Si l’une des conditions n’est pas remplie, la transmission entre frères et sœurs reste possible mais subit une imposition spécifique. Un abattement unique s’applique sur la part recueillie par chaque héritier : 15 932 euros. Au-delà, deux taux sont appliqués :
Montant après abattement | Taux applicable |
---|---|
Jusqu’à 24 430 euros | 35 % |
Au-delà de 24 430 euros | 45 % |
Ainsi, pour un bien transmis d’une valeur nette taxable totale de 60 000 euros, l’héritier paiera des droits selon ce barème après déduction.
le pacs et la condition de célibat dans la succession entre frères et sœurs
La question se pose fréquemment : une personne liée par un Pacs (pacte civil de solidarité), sans être mariée, peut-elle être considérée comme « célibataire » au sens du dispositif d’exonération des droits de succession entre frères et sœurs ? Une affaire portée devant la Cour de cassation a permis d’apporter une réponse claire à cette interrogation.
détail de l’affaire judiciaire récente
Dans cette affaire, un homme décède en 2014. Son seul héritier est son frère, désigné légataire universel. Celui-ci ne règle pas les droits de succession, considérant qu’il remplit les conditions pour l’exonération. L’administration fiscale lui indique qu’il ne peut bénéficier du dispositif car il est lié par un Pacs, signé en 2002. Selon elle, cette situation le fait sortir du statut « célibataire » exigé par la loi.
décision judiciaire et analyse juridique
La Cour de cassation confirme l’interprétation fiscale. Selon l’article 515-4 du Code civil, les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s’engagent à une vie commune. Ce critère distingue clairement le statut du partenaire pacsé, qui ne correspond plus à celui d’un « célibataire » au sens légal. La Cour juge que le bénéficiaire du Pacs ne peut donc accéder au régime d’exonération des droits de succession entre frères et sœurs. Être pacsé revient à former une union reconnue qui exclut formellement ce dispositif.
Ce point a été définitivement entériné dans l’arrêt Cassation commerciale du 28 mai 2025 (n°21-16632).
implications pratiques pour les héritiers liés par un pacs
Pour toute transmission entre frères et sœurs, il convient d’analyser précisément sa situation familiale avant toute démarche successorale. Un engagement dans un Pacs, même sans mariage ni enfants, empêche tout accès à l’exonération des droits de succession. Les héritiers concernés sont alors soumis aux abattements et taux évoqués plus haut.
Dans ce contexte, il est recommandé aux personnes concernées par une éventuelle succession familiale d’interroger un notaire ou un spécialiste du droit patrimonial avant tout choix structurant. Un conseil avisé permet souvent d’anticiper les impacts fiscaux selon sa situation personnelle.
synthèse des règles sur pacs et exonération successorale entre frères et sœurs
Le régime français prévoit que seules les personnes célibataires (ainsi que veuves, divorcées ou séparées) peuvent bénéficier d’une exonération totale des droits lors d’une transmission successorale entre frères et sœurs, sous réserve des autres critères (âge ou infirmité, domicile partagé). La signature d’un Pacs, quelle que soit sa durée ou ses modalités, exclut toute possibilité d’assimilation au statut administratif « célibataire ». Le respect strict des conditions prévues par la loi reste essentiel pour optimiser la transmission familiale. Organiser sa succession en tenant compte du cadre légal permet ainsi d’éviter toute mauvaise surprise fiscale lors du règlement des successions.