Les salariés victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle se demandent souvent jusqu’où s’étend la protection de leur contrat de travail. La loi interdit à l’employeur de rompre ce contrat durant l’arrêt, sauf en cas de faute grave du salarié ou lorsque le maintien du poste devient impossible pour une raison sans lien avec la santé. Une récente décision de la cour de cassation précise que la protection ne s’arrête pas toujours au retour du salarié, mais se prolonge tant que la visite médicale obligatoire n’a pas eu lieu. Cette publication explique cette règle et ses conséquences pour tous les acteurs concernés.
période de protection contre le licenciement après un accident du travail ou une maladie professionnelle
La période de protection débute dès le début de l’arrêt de travail qui fait suite à un accident du travail ou à une maladie professionnelle. Durant cette période, l’employeur n’a pas le droit de licencier le salarié. Cette règle protège le salarié fragilisé par un problème de santé lié au travail.
Il existe deux exceptions à cette protection :
- La faute grave : si le salarié commet un acte rendant impossible son maintien dans l’entreprise.
- L’impossibilité objective de maintenir le contrat pour un motif sans rapport avec l’état de santé (par exemple : fermeture définitive de l’établissement).
En dehors de ces situations, toute tentative de rompre le contrat reste interdite pendant la période protégée.
rôle et obligation de la visite médicale de reprise
La visite médicale de reprise vise à vérifier si le salarié peut reprendre son poste ou s’il a besoin d’aménagements. Elle est obligatoire dans certains cas précis :
- Après un arrêt d’au moins 30 jours pour un accident du travail.
- Après tout arrêt causé par une maladie professionnelle, quelle que soit sa durée.
L’employeur doit organiser cette visite dans les 8 jours qui suivent la reprise effective du travail. Cette étape n’est pas une simple formalité : elle conditionne la fin réelle de la protection contre le licenciement.
fin réelle de la période de protection : le rôle central de la visite médicale obligatoire
Le simple retour du salarié sur son lieu de travail ne met pas fin à la période protégée. Seule l’organisation et la tenue d’une visite médicale obligatoire permettent à l’employeur d’envisager une rupture du contrat en dehors des exceptions déjà citées. Tant que cette visite n’a pas eu lieu, même si le salarié est revenu, il reste sous protection renforcée.
l’affaire tranchée par la cour de cassation : illustration concrète
Un salarié victime d’un accident du travail, en arrêt pendant plus de quatre mois, revient dans son entreprise. L’employeur ne souhaite pas poursuivre leur collaboration mais n’entame aucune procédure officielle. Faute d’activité et sans salaire versé, le salarié saisit les juges pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat aux torts exclusifs de l’employeur.
Le salarié estime que cette rupture survient pendant sa période protégée, car il n’a pas passé la visite médicale obligatoire à son retour.
débats juridiques et décision des juges
Les juges d’appel considèrent tout d’abord que la période protégée a pris fin avec le retour du salarié, donc après son arrêt maladie. Ils requalifient donc la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La cour de cassation, saisie du litige, rappelle que tant que le salarié n’a pas passé sa visite médicale obligatoire, il continue à bénéficier d’une protection renforcée contre le licenciement. La rupture intervenue avant cette visite doit donc être qualifiée non plus comme simple licenciement injustifié, mais comme licenciement nul, entraînant une indemnisation bien supérieure pour le salarié.
Voici un tableau comparatif pour illustrer l’impact sur les indemnités :
Situation | Indemnité minimale |
---|---|
Licenciement sans cause réelle et sérieuse | 1 mois de salaire brut (si ancienneté < 1 an) |
Licenciement nul | 6 mois de salaire brut minimum |
conséquences pratiques pour employeurs et salariés
Pour éviter tout risque juridique et financier, il convient pour l’employeur :
- D’organiser systématiquement la visite médicale obligatoire.
- De ne prendre aucune mesure visant à rompre le contrat avant cette étape.
Le non-respect expose à une requalification en licenciement nul et à six fois plus d’indemnité à verser au salarié lésé.
Pour les salariés, il est utile :
- De vérifier qu’ils bénéficient bien d’une telle visite après un arrêt concerné.
- De faire valoir leurs droits si aucune visite n’est organisée à leur retour.
synthèse des règles et points clés sur la protection après accident du travail ou maladie professionnelle
La vigilance reste essentielle dès qu’un salarié reprend après un arrêt lié au travail ou à une maladie reconnue. Pour chaque partie, connaître les règles sur la protection du contrat de travail, organiser ou solliciter systématiquement la visite médicale obligatoire, évite des litiges longs et coûteux. La décision rendue par la cour de cassation (soc., 14 mai 2025, n° 24-12951) rappelle que seule cette visite met fin à la période protégée, et qu’aucune rupture ne peut intervenir tant qu’elle n’est pas réalisée.