La loi impose aux employeurs de garantir la santé physique et mentale de toutes les personnes qui travaillent ou interviennent dans leur structure. Cette obligation couvre aussi la lutte contre les faits de discrimination et de harcèlement sexuel. La prévention ne suffit pas : dès qu’un signalement est porté à leur connaissance, les employeurs doivent réagir vite et avec efficacité, en menant une enquête interne. La récente décision-cadre du défenseur des droits apporte des recommandations opérationnelles pour accompagner les entreprises, quel que soit leur taille ou leurs ressources.
mettre en place un dispositif d’écoute et de signalement
Un canal dédié permet à toute personne concernée de signaler un fait de discrimination ou de harcèlement sexuel. Ce canal doit rester accessible aux salariés, mais aussi aux candidats à l’embauche, stagiaires, intérimaires, bénévoles, anciens salariés. Plusieurs formats existent :
Moyen de signalement | Description |
---|---|
mail dédié | Adresse électronique confidentielle, gérée par des personnes formées. |
téléphone d’écoute | Ligne d’appel spécifique, assurant l’anonymat si besoin. |
accueil physique | Permanence avec des interlocuteurs identifiés. |
plateforme en ligne | Espace sécurisé pour déposer un signalement écrit. |
Les interlocuteurs chargés du recueil doivent faire preuve d’impartialité : ils n’ont aucun lien direct ou indirect avec la personne qui effectue le signalement. Ils reçoivent une formation spécifique et garantissent une écoute neutre. Il reste nécessaire d’informer tous les membres de l’entreprise sur le fonctionnement du dispositif, par affichage, réunions ou messagerie interne, afin que chacun sache comment agir en cas de besoin.
recueillir le signalement
Quand un signalement arrive, il faut recueillir un témoignage précis. On demande à la personne concernée :
- d’exposer les faits en détail : dates, lieux, circonstances
- d’apporter toute preuve disponible (mails, SMS, documents)
- d’indiquer si des témoins peuvent confirmer tout ou partie des faits
La confidentialité s’impose dès ce stade. Toute information partagée reste protégée pour éviter toute atteinte à la vie privée ou à la réputation des personnes.
déclencher et mener l’enquête interne
L’employeur dispose d’un délai maximum de deux mois après le signalement pour lancer une véritable enquête interne. L’équipe d’enquête comprend au moins deux personnes pour garantir l’impartialité. Aucune d’elles ne doit avoir de lien avec l’affaire.
Principes à respecter lors de l’enquête :
- impartialité : aucune influence extérieure ni préjugé sur les faits évoqués.
- collégialité : plusieurs enquêteurs pour renforcer la neutralité.
- discrétion : toutes les démarches se font sans publicité excessive.
- respect du contradictoire : chaque partie (auteur présumé, victime, témoins) est entendue sur les faits qui le concernent.
- diligence : l’enquête doit aboutir dans un délai court, sans attendre inutilement.
rédiger le rapport d’enquête
À l’issue des investigations, un rapport écrit synthétise tous les éléments réunis. Il doit comporter :
- Description des faits allégués et du signalement initial ;
- Moyens mis en place pour protéger la victime pendant l’enquête ;
- Détail des étapes suivies et obstacles rencontrés ;
- Description des preuves réunies à charge ou à décharge ;
- Synthèse des auditions réalisées (victime, auteur présumé, témoins) ;
- Ancrage juridique proposé (qualification comme discrimination ou harcèlement sexuel) ;
- Préconisations pour traiter la situation (sanction, médiation, protection supplémentaire) ;
Ce document sert de base à toute décision ultérieure.
sanctionner les auteurs avérés
L’employeur examine objectivement les faits établis. Il qualifie juridiquement s’il s’agit bien de discrimination ou de harcèlement sexuel. Aucune minimisation ni justification n’est recevable (y compris sous couvert d’humour).
La sanction doit remplir trois critères :
- dissuasif : elle évite la répétition du comportement fautif ;
- effectif : elle produit un effet réel sur l’auteur ;
- proportionné à la gravité des faits constatés.
Si l’auteur occupe une fonction hiérarchique sur la victime, la sanction sera plus lourde. Un suivi post-sanction peut être mis en place pour garantir qu’aucun nouvel acte ne survienne et que la victime reste protégée.
adapter la démarche aux ressources disponibles
Dans une petite structure sans ressources humaines dédiées, certaines étapes peuvent être ajustées. L’essentiel reste que l’employeur soit capable de justifier auprès du défenseur des droits ou des autorités qu’il a agi avec sérieux et bonne foi compte tenu de ses moyens. Ces adaptations ne doivent pas remettre en cause le respect des principes fondamentaux : accessibilité du dispositif, impartialité et confidentialité.
s’assurer d’une démarche solide et conforme au droit social actuel
Appliquer chaque étape protège les victimes mais aussi l’entreprise contre tout litige futur. Une procédure claire limite les risques juridiques liés à une mauvaise gestion d’un signalement. Pour aller plus loin et adapter au mieux ses pratiques, il convient de consulter la décision-cadre du défenseur des droits publiée en février 2025 qui éclaire les points délicats et offre un cadre fiable tant pour les grandes structures que pour les petites entreprises.