Adoptée en mars 2025, la loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture répond à une forte attente des acteurs du secteur agricole. Elle vise à renforcer la place de l’agriculture dans la société française tout en facilitant l’installation des jeunes et la transmission des exploitations. Ce texte introduit aussi de nouvelles règles sur la formation, les produits phytosanitaires et la gestion administrative, en tenant compte des enjeux de durabilité et de compétitivité. Plusieurs mesures illustrent cette volonté d’adapter le modèle agricole français aux défis contemporains, tout en mettant l’accent sur l’accompagnement de la transition générationnelle.
reconnaissance de l’agriculture comme intérêt général majeur
La loi d’orientation agricole 2025 donne au secteur agricole un statut d’intérêt général majeur. Cette reconnaissance affirme que la protection, la valorisation et le développement de l’agriculture, de la pêche et de l’aquaculture relèvent d’un intérêt fondamental de la Nation. Ce statut confère à ces activités un rôle stratégique dans la garantie de la souveraineté alimentaire.
Sur le plan symbolique, ce positionnement place l’agriculture au centre des politiques publiques. Les décisions qui concernent ce secteur prennent désormais en compte cet impératif national. Sur le plan pratique, cette reconnaissance prépare l’organisation des premières « conférences de la souveraineté alimentaire » en 2026, coordonnées par FranceAgriMer. Ces rencontres réuniront les parties prenantes pour suivre les avancées et proposer des ajustements adaptés aux réalités du terrain.
installation et transmission des exploitations
Le renouvellement des générations reste un enjeu majeur pour assurer la continuité du secteur agricole. La loi met en place plusieurs outils pour faciliter cette transition.
france services agriculture, guichet unique départemental prévu dès janvier 2027, devient un point d’entrée central pour les candidats à l’installation et les exploitants souhaitant transmettre leur ferme. Il propose un accompagnement personnalisé, notamment sur :
- Les démarches administratives
- L’accès aux outils d’évaluation économique
- L’adaptation aux changements climatiques
L’aide au passage de relais s’adresse aux exploitants âgés d’au moins 59 ans transmettant leur exploitation à un jeune éligible aux aides à l’installation. Cette aide est versée jusqu’à la retraite lors de la cession effective.
Le droit à l’essai offre une nouvelle souplesse. Une personne peut tester son projet agricole pendant un an (renouvelable une fois) dans une société existante avec d’autres exploitants. Ce contrat peut être résilié à tout moment, ce qui limite les risques pour le porteur de projet.
dispositif | bénéficiaires | modalités |
---|---|---|
france services agriculture | Candidats à l’installation, cédants | Guichet unique dès 2027, accompagnement complet |
aide au passage de relais | Agriculteurs ≥ 59 ans transmettant leur exploitation | Aide financière jusqu’à la retraite si reprise par un jeune installé |
droit à l’essai | Porteurs de projet en phase test | Contrat d’un an renouvelable une fois, résiliable à tout moment |
formation et attractivité des métiers agricoles
Pour répondre au besoin croissant de compétences dans le secteur, le texte crée le diplôme national « bachelor agro ». Ce cursus vise à former des professionnels capables de gérer une exploitation compétitive et adaptable face aux aléas économiques ou climatiques.
Le bachelor agro cible prioritairement les jeunes souhaitant s’engager dans une carrière agricole. Il combine enseignements techniques, gestion d’entreprise et adaptation aux enjeux environnementaux. Par exemple, un étudiant pourra acquérir dès sa formation les bases nécessaires pour diversifier ses cultures ou investir dans du matériel plus économe.
Ce nouveau diplôme s’inscrit aussi dans une démarche visant à valoriser les métiers agricoles auprès du grand public et à attirer davantage de vocations.
gestion des produits phytosanitaires
La loi précise que l’utilisation des produits phytopharmaceutiques reste autorisée si ceux-ci sont validés par l’Union européenne et qu’aucune alternative viable n’existe. Cela vise à garantir que les agriculteurs disposent des moyens nécessaires pour protéger leurs cultures.
Voici les règles appliquées :
- Un produit homologué au niveau européen peut être utilisé.
- Si une solution alternative apparaît sur le marché, elle doit être privilégiée.
- Le débat porte sur l’équilibre entre protection des récoltes et respect de l’environnement.
Par exemple, un agriculteur confronté à une invasion d’insectes sur ses cultures peut employer un produit phytosanitaire autorisé tant qu’aucune solution locale ne répond au même besoin.
simplification administrative : haies et réserve d’eau
Les démarches liées à la gestion des haies sont simplifiées grâce à un régime unique de déclaration ou d’autorisation préalable pour tout projet de destruction. Cela permet aux agriculteurs d’avoir une procédure claire, tout en garantissant le respect du patrimoine naturel bocager.
Concernant les projets agricoles structurants comme les réserves d’eau ou bâtiments d’élevage, la loi introduit une présomption d’urgence lors des contentieux administratifs. Ce mécanisme réduit les délais liés aux recours juridiques et facilite ainsi la réalisation rapide des investissements nécessaires.
Exemple : pour construire une réserve destinée à stocker l’eau pour l’irrigation estivale, le porteur du projet bénéficie désormais d’une instruction accélérée en cas de recours.
sanctions environnementales assouplies
Le régime disciplinaire évolue lorsque certaines atteintes à l’environnement ne résultent ni d’une intention ni d’une négligence grave. Dans ces situations :
- L’amende administrative maximale est fixée à 450 €
- Un stage obligatoire de sensibilisation remplace parfois la sanction pécuniaire
- Une peine de prison ou une forte amende n’est plus prévue
Tableau comparatif :
Infraction | Avant mars 2025 | Après mars 2025 |
---|---|---|
Non-intentionnelle | Jusqu’à 3 ans prison + amende | Amende max. : 450 € ou stage sensibilisation |
Avec intention/négligence | Peine pénale | Maintien du régime pénal |
Ce changement vise à distinguer clairement entre erreur involontaire et faute grave, tout en sensibilisant davantage à l’environnement par une approche éducative.
dispositions censurées par le conseil constitutionnel
Le Conseil constitutionnel a supprimé plusieurs articles initiaux lors du contrôle préalable :
- Suppression de la présomption de bonne foi pour les contrôles administratifs
- Annulation du principe interdisant toute norme supérieure aux exigences européennes (pour éviter la surtransposition)
- Refus d’exclure certains bâtiments agricoles du calcul dans le cadre du « zéro artificialisation nette »
Cette censure limite certains assouplissements réglementaires que prévoyait initialement le texte final publié au journal officiel sous le numéro 2025-268 du 24 mars 2025.
perspectives et suivis attendus après l’adoption de la loi
L’entrée en vigueur effective dépendra des décrets d’application non encore publiés. Les acteurs agricoles attendent maintenant leur publication pour préciser chaque mesure opérationnelle. Les futures conférences de souveraineté alimentaire prévues dès 2026 permettront aussi d’ajuster ces dispositifs selon les premiers retours du terrain.
Plusieurs débats restent ouverts concernant notamment les équilibres entre compétitivité économique et respect environnemental ou encore sur l’attractivité réelle des nouveaux dispositifs pour les jeunes générations. Le suivi attentif des effets concrets sera déterminant pour mesurer si cette réforme répond bien aux besoins exprimés par le secteur agricole français.