Les actes et décisions pris au sein d’une société sont soumis à des règles strictes. Si ces règles ne sont pas respectées, le risque existe que des actes clés, voire la société elle-même, soient remis en cause. Cette situation fragilise la vie des entreprises et leur sécurité juridique. Pour répondre à ces inquiétudes, l’ordonnance du 12 mars 2025, entrée en vigueur le 1er octobre, apporte des changements notables. Elle vise à clarifier et simplifier le régime des nullités en droit des sociétés, afin d’assurer la stabilité des structures et de limiter les contestations.
contexte et objectifs de la réforme
Jusqu’ici, la menace d’une nullité des actes et décisions en droit des sociétés pesait lourdement sur les entreprises. Les causes d’annulation étaient multiples et parfois imprécises, ouvrant la porte à des contestations fréquentes. Cette incertitude affaiblissait la confiance des associés, des investisseurs et des partenaires.  
Les pouvoirs publics souhaitent renforcer la stabilité juridique des sociétés, pour que leur fonctionnement ne soit pas paralysé par des risques juridiques trop larges. La nouvelle réglementation vise donc deux objectifs  : clarifier les causes permettant d’annuler un acte ou une décision, et restreindre ces situations au strict nécessaire.
causes de nullité d’une société
L’ordonnance du 12 mars 2025 limite désormais strictement les motifs permettant d’annuler la constitution d’une société.  
La nullité d’une société ne peut être prononcée que pour  :
- l’incapacité juridique de tous ses fondateurs ;
- la violation du nombre minimal de deux associés (hors eurl et sasu).
Avant la réforme, d’autres motifs pouvaient entraîner l’annulation d’une société  : un objet social illicite, un vice du consentement lors de la signature des statuts, ou encore le non-respect de diverses formalités.  
Par exemple  :
| Ancien régime | Nouveau régime | 
|---|---|
| Objet social illicite (ex : activité interdite) | N’entraîne plus la nullité de la société, mais peut être sanctionné autrement | 
| Erreur ou dol lors de la constitution | N’entraîne plus la nullité de la société, mais ouvre d’autres recours | 
Ce recentrage protège la société des risques d’annulation pour des motifs qui pouvaient être invoqués parfois tardivement.
nullités des décisions sociales
La nouvelle réglementation distingue désormais deux motifs principaux pour annuler une décision sociale :
- la violation d’une disposition impérative du droit des sociétés ;
- la violation d’une cause générale de nullité des contrats.
Une simple violation des statuts ne suffit plus pour annuler une décision, sauf dans les sas qui prévoient expressément cette sanction dans leurs statuts.
Un exemple  :  
Si une assemblée générale ne respecte pas un délai de convocation prévu par les statuts, mais non imposé par la loi, cette irrégularité ne permet plus d’annuler la décision prise, sauf si la société est une sas qui a prévu cette sanction dans ses statuts. Auparavant, cette même irrégularité pouvait suffire à remettre en cause la décision.
conditions strictes du prononcé de la nullité
Pour limiter les contestations abusives, la réforme impose trois conditions cumulatives pour qu’un juge puisse annuler une décision sociale :
- Le demandeur doit prouver que l’irrégularité subie lui cause un grief personnel.
- L’irrégularité doit avoir influencé le contenu ou le sens de la décision contestée.
- L’annulation ne doit pas avoir de conséquences trop lourdes pour l’intérêt général de la société.
Le juge doit ainsi apprécier l’équilibre entre la protection des droits individuels et la stabilité collective de la société.  
Par exemple, une erreur de procédure ayant influencé le vote lors d’une assemblée pourra donner lieu à annulation, mais pas si l’erreur est mineure ou sans influence réelle.
limitation des nullités en cascade
La réforme vise à éviter les nullités en cascade, qui pouvaient déstabiliser gravement les sociétés. Désormais, si la nomination d’un dirigeant est annulée (parce qu’elle ne respecte pas les règles), cela n’entraîne plus automatiquement l’annulation de toutes les décisions prises ensuite par ce dirigeant ou l’organe concerné.
Si le retour en arrière complet risque de nuire gravement à la société, le juge peut choisir de différer les effets de la nullité dans le temps. Cette mesure protège les tiers et l’intérêt général de l’entreprise.
délai de prescription réduit
La durée pour demander la nullité d’une société ou d’une décision sociale passe de trois à deux ans (sauf exceptions). Ce délai court à compter du jour où la personne a connaissance de l’irrégularité.
Conséquences pratiques :
- Les associés doivent agir plus vite s’ils veulent contester un acte ou une décision.
- Les sociétés bénéficient d’une sécurité renforcée après deux ans.
points clés à retenir sur la réforme des nullités en droit des sociétés
La réforme opérée par l’ordonnance du 12 mars 2025 simplifie et clarifie le régime des nullités des actes et décisions en droit des sociétés. Les causes d’annulation sont désormais limitées et précisément encadrées. Les conditions pour obtenir l’annulation d’une décision exigent une véritable atteinte aux droits du demandeur et une irrégularité ayant une influence réelle. Les nullités en cascade sont stoppées, et le délai d’action est réduit à deux ans.  
Les entreprises doivent s’adapter à ce nouveau cadre et veiller à la conformité de leurs actes, tout en profitant d’une stabilité juridique accrue.
Sources  :  
ordonnance n° 2025-229 du 12 mars 2025, jo du 13
