Sectorisation des activités dans les associations : exigences, risques fiscaux et jurisprudence récente

Photo of author

Par Nicolas

Les associations agissent souvent dans un but non lucratif et ne sont pas soumises aux impôts commerciaux. Pourtant, certaines mènent en parallèle des activités qui génèrent des recettes. Lorsque ces activités lucratives ne bénéficient ni de la franchise en base ni d’exonérations spécifiques, elles deviennent imposables à l’impôt sur les sociétés. Pour limiter cette imposition, une association peut choisir de sectoriser ses activités : cela permet alors de ne soumettre à l’impôt que le secteur lucratif, si certaines règles sont respectées. Ce mécanisme soulève des questions pratiques et juridiques auxquelles il convient de répondre avec rigueur.

définition et cadre juridique

La sectorisation désigne la séparation comptable des différentes activités d’une association. On distingue alors un secteur lucratif, soumis à l’impôt sur les sociétés, et un secteur non lucratif, qui reste exonéré.

Le Bulletin officiel des finances publiques (bofip) fixe deux conditions à respecter pour qu’une association puisse appliquer cette sectorisation  :

  • les activités lucratives doivent être clairement dissociables des activités non lucratives ;
  • les activités non lucratives doivent demeurer de façon significative prépondérantes.
Intégration fiscale : détention du capital et actionnariat salarié

Ces exigences s’apprécient au regard de la gestion, des moyens utilisés, des charges supportées et du lien existant entre les différents secteurs.

présentation de l’affaire récente

Un exemple récent met en lumière les risques liés à une sectorisation mal maîtrisée. Une association intervenant dans la recherche pharmaceutique sur les maladies rares a tenté de séparer ses activités selon ce schéma  :

Secteur non lucratifSecteur lucratif
Recherche médicale fondamentale (conception des médicaments)Développement pharmaceutique (essais cliniques, études pré-commercialisation)

L’association estimait que ses travaux de recherche relevaient du secteur non lucratif tandis que le développement en vue de la commercialisation constituait une activité lucrative.

analyse des motifs du redressement fiscal

Lors d’un contrôle, l’administration fiscale n’a pas reconnu la sectorisation opérée par l’association. Deux éléments principaux ont motivé ce choix  :

  • prépondérance insuffisante du secteur non lucratif : les charges liées au secteur lucratif représentaient 49,9 % du total. La part non lucrative n’était donc plus majoritaire.
  • dissociation impossible des deux secteurs : les juges ont relevé que la recherche et le développement pharmaceutique formaient un processus continu sans réelle séparation fonctionnelle.
Le contrat d'accompagnement dans l'emploi: une opportunité spécifique pour l'insertion professionnelle

L’administration a donc soumis l’ensemble des résultats de l’association à l’impôt sur les sociétés.

appréciation du juge

La cour administrative d’appel a validé ce redressement fiscal. Les juges ont appliqué strictement les critères posés par le bofip  : absence de séparation nette entre les secteurs et poids trop important du secteur lucratif dans les charges totales.

Le conseil d’état a rejeté le recours en cassation formé par l’association (décision du 10 mars 2025). Cela confirme l’interprétation retenue par l’administration et souligne la rigueur attendue lors de la mise en œuvre de la sectorisation.

conseils pratiques et points de vigilance pour les associations

Pour limiter les risques fiscaux liés à la sectorisation, plusieurs recommandations s’imposent  :

  • respecter strictement les conditions : la dissociation doit être réelle et vérifiable tant sur le plan comptable que fonctionnel.
  • s’assurer que le secteur non lucratif reste majoritaire : surveiller la répartition des charges et des moyens affectés à chaque secteur.
  • analyser le lien entre activités : un enchaînement logique ou une interdépendance forte peut remettre en cause la sectorisation.
  • documenter précisément la séparation : tenir une comptabilité distincte pour chaque secteur, rédiger des descriptions précises des activités et affecter clairement les ressources humaines ou matérielles.
  • solliciter un accompagnement professionnel : faire appel à un expert-comptable ou à un conseiller fiscal pour sécuriser la démarche.
Logiciels de caisse : comment gérer la transition vers la certification obligatoire

synthèse et orientations pour agir sereinement

Une mauvaise application ou compréhension de la sectorisation expose une association à une imposition globale sur ses résultats. Le respect strict des critères légaux et fiscaux reste donc essentiel pour préserver le caractère non imposable du secteur associatif non lucratif. Face aux zones d’ombre ou aux situations complexes, il paraît judicieux pour toute structure concernée de se faire accompagner par un professionnel afin d’éviter tout risque de requalification fiscale.

Laisser un commentaire