Lorsqu’une personne décède, la gestion de son patrimoine ne s’arrête pas avec la disparition. Les biens du défunt entrent alors en indivision successorale, c’est-à-dire qu’ils appartiennent collectivement aux héritiers jusqu’au partage final. Cette situation concerne aussi d’autres circonstances : la liquidation d’un régime matrimonial ou l’achat en commun par des concubins, des partenaires de pacs ou des tiers. Dans tous les cas, la gestion collective de ces biens peut vite générer des tensions et rendre tout accord difficile. Ces blocages ne touchent pas seulement les familles ; ils contribuent aussi à freiner le marché immobilier, en particulier dans des zones rurales où la vacance de logements devient un vrai problème.
les enjeux de l’indivision successorale et ses impacts sur le marché immobilier
L’indivision est souvent perçue comme un frein au dynamisme du marché foncier. Lorsqu’aucun accord ne se dessine entre les indivisaires, les biens concernés restent sans usage pendant des années. On parle alors d’immobilisation du patrimoine : maisons, terrains ou appartements sont inoccupés et ne peuvent ni être vendus ni rénovés. Ce phénomène est accentué dans certains territoires ruraux, où il aggrave la vacance immobilière.
Exemple concret :
- Une famille hérite d’une maison à la campagne. Un héritier souhaite vendre, un autre préfère la garder, le troisième ne répond jamais aux sollicitations. Le bien reste fermé, sans entretien, parfois plusieurs décennies.
- Selon des études récentes (sources publiques), plusieurs milliers de logements restent ainsi inoccupés chaque année pour cause d’indivision conflictuelle.
Ce blocage contribue à restreindre l’offre de logements disponibles et freine les transactions immobilières. Les pouvoirs publics y voient un enjeu majeur pour relancer le marché, en particulier dans les secteurs où le manque de biens disponibles se fait sentir.
analyse de la proposition de loi sur la convention obligatoire en indivision successorale
Face à ce constat, une nouvelle proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale (n° 1814 du 16 septembre 2025) vise à réformer l’indivision successorale. Son objectif est d’éviter l’enlisement des dossiers et de fluidifier la gestion collective. Trois axes structurent ce texte :
1. obligation de conclure une convention écrite dans les trois mois :
Dès la naissance de l’indivision (suite à un décès ou autre événement), les indivisaires auraient trois mois pour signer une convention d’indivision. Ce document doit fixer :
- Les règles de gestion quotidienne (entretien, location, décisions à majorité ou unanimité)
- La participation financière de chacun
- La désignation possible d’un gérant pour représenter le groupe
2. suspension du droit au partage tant que la convention n’est pas signée :
Aucun partage des biens indivis ne pourrait avoir lieu tant que la convention n’a pas été conclue. Deux exceptions existent :
- Motif grave
- Mise en péril manifeste du bien (par exemple : dégradation urgente)
3. fiscalité responsabilisante :
Le texte prévoit une fiscalité incitative pour favoriser le respect des délais :
- Exonération des droits fixes d’enregistrement pour ceux qui signent dans les temps
- Pénalités progressives pour les retardataires sous forme d’imposition forfaitaire croissante
Tableau récapitulatif des mesures :
Pilier | Description | Avantages | Sanctions/pénalités |
---|---|---|---|
Convention obligatoire | Signature sous 3 mois avec règles claires | Facilite la gestion | Suspension du droit au partage |
Suspension du partage | Pas de partage sans convention sauf urgence | Force l’accord | — |
Fiscalité incitative | Exonération ou pénalité selon délai respecté | Récompense ou sanction | Imposition progressive |
démarches et conséquences pratiques pour héritiers et propriétaires
L’adoption de cette réforme impliquerait plusieurs changements concrets pour les personnes concernées par une indivision successorale :
démarches nouvelles à réaliser :
- Rédaction collective et signature d’une convention écrite sous trois mois
- Consultation d’un notaire conseillée pour garantir la validité juridique
- Désignation éventuelle d’un gérant parmi les indivisaires
bénéfices attendus :
- Règles claires dès le départ sur l’entretien et la gestion
- Moins de conflits familiaux grâce à un cadre formalisé
- Possibilité de débloquer plus vite certaines situations grâce au rôle du gérant
exemples concrets :
- Si un héritier souhaite louer un terrain indivis, il saura rapidement si cela est possible ou non grâce aux règles définies ensemble.
- En cas d’urgence (toiture endommagée), une décision rapide sera plus facile avec un gérant désigné.
inconvénients possibles :
- Nécessité de se réunir rapidement après le décès ou un achat commun
- Risque que certains indivisaires refusent toute démarche ou n’assument pas leurs obligations
Globalement, cette réforme cherche à rendre plus fluide et responsable la gestion collective du patrimoine familial tout en limitant les sources potentielles de conflit.
perspectives et calendrier législatif
Si le Parlement adopte cette réforme, elle pourrait entrer en vigueur dès le 1er janvier suivant sa promulgation officielle (par exemple, début 2026). D’ici là, le texte suivra les étapes classiques du processus législatif : examen en commission, discussions à l’Assemblée nationale puis au Sénat.
Les professionnels du droit et associations familiales suivent attentivement ce chantier législatif. Certains saluent l’idée d’une meilleure organisation ; d’autres pointent le risque d’alourdir les démarches pour des familles déjà éprouvées par un décès. Les débats publics devraient affiner encore certains points techniques avant toute mise en application.
bénéfices potentiels et vigilance sur l’évolution législative
La mise en place d’une convention obligatoire en indivision successorale devrait aider à limiter les conflits entre héritiers et accélérer le retour des biens bloqués sur le marché immobilier. Clarifier dès le début les droits et devoirs facilite la prise de décision collective et réduit les risques de vacance prolongée. Pour tous ceux concernés par une succession ou un achat collectif, suivre l’évolution du texte législatif permettra d’anticiper ses effets sur la gestion du patrimoine partagé.